Yoann LOISEL
Psychiatre, psychanalyste
Mary Shelley, noir sur blanc le traumatique
Discutante : Annette FREJAVILLE, Psychanalyste, Psychiatre, Membre titulaire de la Société Psychanalytique de Paris
Comment la création littéraire vient lier avant de donner à lire, repriser, une vibration traumatique ?
Mary Shelley nous donne l’exemple d’une telle suture : son œuvre la plus célèbre entremêle les registres du mort et du vif, ceux-là qui, pour nous, constituent le fond du traumatisme.
Nous tenons au livre… nous souhaitons ne jamais passer, intégralement, au numérique tant nous croyons aux vertus d’un certain négatif, celui qui permet, d’une émulsion singulière, d’une épreuve toujours, de constituer la représentation.
La question, de l’aménagement du traumatique par et dans la création, revient à s’interroger sur les qualités de négatif qui permettent de jouer du pire pour le déjouer.
Pour le dire autrement : pourquoi la jeune Mary met à mort un enfant prénommé William dans son roman, tandis qu’elle pouponne chèrement son fils, le petit William, après avoir perdu, à quelques jours de vie seulement, un précédent enfant ? ou encore : comment le monstre est petit-fils des parents de Mary, son père William (encore !), sa mère Mary décédée de fièvre puerpérale ? Cette interrogation ouvre aussi celle de la dynamique générationnelle de la vibration traumatique.
Conseils bibliographiques
Frankenstein évidemment, mais surtout la deuxième préface rédigée par Mary Shelley, lorsqu’elle interroge à posteriori les ressorts de son imagination. Cette préface se trouve notamment dans l’édition Garnier-Flammarion 1979, édition pour nous de référence tant le dossier introductif, les notes et les archives citées par F. Lacassin sont, comme à son habitude, absolument remarquables.
Une biographie : Muriel Spark, Mary Shelley : la mère de Frankenstein, Editions du Rocher, 2003.
Mathilda, Editions des femmes, 1984.
Et, si un peu de curiosité supplémentaire : de William Godwin, Les choses telles qu’elles sont, ou les aventures de Caleb Williams, chez Phébus, 1997.
Yoann LOISEL