Séminaire BABYLONE – Psychanalyse & Littérature – 6 février 2012 [104]





Yves SARFATI
Professeur de psychiatrie, psychanalyste – CMPRS, Université Paris VII
COURBET aux rayons XX
Discutant : Silke SCHAUDER, Maître de conférences-HDR à l'IED-Université Paris 8,
responsable pédagogique du DESU Art-Thérapie, psychologue clinicienne, essayiste

De Gustave Courbet (1819-1877), la postérité retient surtout deux performances oedipiennes sans commune mesure et sans précédent : d’une part, avoir osé le premier peindre en face L’Origine du Monde ; d’autre part, avoir osé descendre l’Empereur de sa colonne Vendôme – rappelons-le : au nom des Etats-Unis d’Europe. Les historiens de l’art contemporains, quant à eux, s’accordent pour faire de son œuvre peint – qu’ils s’accordent désormais à considérer à la hauteur de celui d’un Rembrandt ou d’un Vélasquez – une vaste et énigmatique Allégorie Réelle dont seule la psychanalyse serait susceptible, à les en croire, de pénétrer les arcanes.

Ils ont été pris au mot : un colloque organisé en septembre 2011 a réuni tous les spécialistes de Courbet (historiens, historiens d’art, conservateurs), croisant leurs vues à celles de praticiens de l’esprit (psychiatres, psychanalystes, neuroscientifiques), dialogue qui a marqué, dans la réception du peintre « l’étape la plus importante depuis la dation Lacan au musée d’Orsay » (Laurence des Cars). L’intervention que je proposerai au séminaire Babylone fera partager les fruits de cette relecture interdisciplinaire, et plongera dans l’intimité de tableaux qui, loin de leur prétendu « Réalisme », font corps avec l’artiste, suivant une incarnation motrice qui préfigure la performance moderne.

Nous évoquerons tour à tour : la territorialisation de la production de Courbet dans sa vallée de la Loue natale, si profondément ancrée en lui ; la topographie fantastique des grottes de Franche-Comté et leur influence dans sa pensée paysagère ; la place tenue par un grand-père maternel sans-culotte figurant un Idéal du Moi régicide ; le rôle joué par la mort prématurée d’un frère aîné, puis de deux sœurs cadettes ; la folie d’une autre sœur, morte à l’asile, et celle d’un père décrit du comtoisisme de « cudot » (farfelu). Nous étudierons enfin en détail les mystères que recèlent la radiographie inédite des célèbres Baigneuses (Musée Fabre) dont la complexité révèle la valeur pour le moins ambiguë du nu féminin dans les fantasmagories du peintre.

Repères bibliographiques
Dominique de Font-Réaulx et Laurence des Cars. Catalogue de la rétrospective Courbet au Grand Palais 2007/2008 – Réunion des Musées nationaux, Paris, 2007
Petra Chu – Edition commentée de la Correspondance de Gustave Courbet – Flammarion, Paris, 1996
Sous la Direction de Mathilde Arnoux, Dominique de Font-Réaulx, Laurence des Cars, Stéphane Guégan et Scarlett Reliquett – Courbet à Neuf ! – Editions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2010
Michael Fried – Le Réalisme de Courbet – NRF Essais, Gallimard, Paris, 1990
Michèle Haddad – Gustave Courbet, Peinture et Histoire – Presses du Belvédère, Paris, 2007
Ségolène Le Men – Courbet – Editions Citadelles – Mazenod, Paris, 2007
Georges Riat – Gustave Courbet peintre – H. Floury, Paris, 1906
à paraître : Sous la direction d’Yves Sarfati - Actes du colloque : Transferts de Courbet –  Editions des Presses du Réel, Dijon, 2012.

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